Premium Beauty News - Quand vous évoquez Be+Radiance, vous préférez parler de maquillage healthy plutôt que clean.
Aïmara Coupet - Le clean pour moi ne veut pas dire grand-chose. C’est simplement choisir des ingrédients sains pour l’environnement et l’humain. Même chose pour le bio et le naturel, il y a dans la naturalité plein de choses qui peuvent endommager la peau.
On entend aussi beaucoup parler de skincare makeup, mais de quoi s’agit-il ? De produits à base de silicones, d’huile minérale pétrochimique, auxquels on a ajouté quelques gouttes d’acide hyaluronique et deux-trois bons ingrédients. Ça ne respecte pas la peau et ça n’a aucun bénéfice, au contraire. C’est du marketing, et ça trompe les consommatrices.
Un maquillage sain veut dire qu’il est vraiment bon pour la peau et qu’il ne vient pas annuler les effets de notre routine beauté. Il doit en faire partie et ne pas juste être considéré comme un cache-misère. C’est le maquillage du futur et c’est le processus dans lequel s’inscrit Be+Radiance.
Premium Beauty News - On voit sur le marché de plus en plus de soins aux probiotiques. Vous les avez intégrés au maquillage. Comment avez-vous pris conscience de leur potentiel ?
Aïmara Coupet - Lors d’une journée Premium Beauty News en 2018, j’ai rencontré un docteur en biologie qui venait présenter son travail sur des encapsulations de probiotiques et leurs bénéfices pour la peau. Son objectif était de garder les bactéries probiotiques vivantes. Très compliqué à intégrer à la cosmétique, mais pas impossible en maquillage. Mon fond de teint n’était pas encore commercialisé mais j’avais déjà en tête de développer des blushes et enlumineurs en poudre. C’est ainsi que nous nous sommes retrouvés à les formuler avec les encapsulations de probiotiques. L’huile de soin en contient aussi et nos utilisatrices en sont ravies.
L’étude du microbiote est fascinante. On se rend compte de l’importance de ne pas le perturber. On le fait pourtant au quotidien en utilisant des actifs comme le rétinol par exemple qui sont ultra agressifs et qui perturbent plus qu’ils ne soignent.
Premium Beauty News - Vous êtes particulièrement engagée sur le sujet de la beauté inclusive. Pour quelle raison ?
Aïmara Coupet - Ma mère est martiniquaise et a la peau noire. Durant toute mon enfance, elle n’est jamais parvenue à trouver de rouges à lèvres ou fonds de teint adaptés à sa carnation sur les stands des grandes marques de luxe. J’ai donc été confrontée à ce sujet dès mon plus jeune âge, mais c’est en arrivant chez Black Up que je me suis rendue compte de l’ampleur du problème.
Les peaux foncées ont des besoins skincare et makeup complètement différents, mais on refuse de l’entendre et on voudrait rester sur un one size fits all. Prenons l’exemple du silicone : si les peaux claires peuvent apprécier le masque d’occlusion qu’ils confèrent, c’est moins évident pour les peaux riches en mélanine. Je pense aussi aux filtres solaires et aux nacres qui ont tendance à griser les peaux foncées. Les ombres et lumières ne se travaillent pas de la même façon puisque les bombés et reliefs sont différents. Même chose pour les lèvres.
Premium Beauty News - Avec Fenty ou Huda Beauty, il semblerait qu’on ait avancé sur le sujet de l’inclusion ?
Aïmara Coupet - Pour moi, il y a clairement un avant et après Fenty. On retrouvait déjà beaucoup de teintes de fond de teint chez MAC, Estée Lauder, Clinique ou Lancôme. Mais Rihanna a vraiment révolutionné les choses en pensant équitablement aux besoins de toutes les femmes. C’est la première fois qu’un lancement était fait avec une gamme construite en arc-en-ciel et pas en shade extension. Et ça vaut également pour les textures qui ont aussi été pensées pour les peaux mates et noires. Rihanna a d’emblée été inclusive et c’est ce qui fait le succès de sa marque. Huda Kattan a eu un processus similaire avec les femmes du Moyen-Orient.
Premium Beauty News - Aujourd’hui de nombreuses marques annoncent des gammes de 30, 40 ou 50 teintes de fond de teint. C’est l’inclusion dont vous rêvez ?
Aïmara Coupet - Après Fenty, toutes les marques ont voulu proposer des gammes de 50 teintes voire plus. Ce n’est pourtant pas le sujet.
Il faut aujourd’hui avoir une véritable connaissance des différences dans la structure et les besoins de la peau. C’est ça l’inclusion et c’est ma vision du futur. Le jour où on arrivera à des gammes réfléchies jusqu’au bout pour prendre en compte les spécificités de toutes les peaux on sera dans l’inclusion.
Tous les sujets autour de la diversité et de l’inclusivité sont compliqués à faire entendre. Dans toutes les équipes de développement, il y a une sous-représentation des peaux autres que caucasiennes. On est beaucoup trop caucasian centred. Très peu de moyens ont été investis pour comprendre les besoins des peaux riches en mélanine. Les peaux foncées sont un support extraordinaire, on peut faire des choses magnifiques… à condition de savoir et de vouloir le faire.
Premium Beauty News - Votre fond de teint à l’eau de concombre existe en 17 teintes seulement ?
Aïmara Coupet - Ce qui fonctionne pour moi c’est l’équité. Mon arc-en-ciel est relativement proportionnel. Il y a des gammes avec plus de teintes que les miennes, mais moins de choix pour les peaux de couleur. Ce n’est pas logique. D’ailleurs, trouver sa teinte est une notion discutable en maquillage. On ne cherche pas un produit de sa teinte mais plutôt la bonne teinte pour corriger ses défauts et rendre la peau uniforme sans que ce soit détonnant. On ne veut pas couvrir notre peau, on veut quelque chose qui va unifier, corriger, donner de l’éclat et qui se fonde bien.
Premium Beauty News - Quelles perspectives pour Be+Radiance ?
Aïmara Coupet - Une levée de fonds d’amorçage en 2020 nous a permis de lancer les poudres et l’huile aux probiotiques, et aussi d’embaucher, notamment en R&D. Après deux ans, notre concept est validé mais nous avons besoin de moyens pour aller plus loin. Nous travaillons depuis quelques mois à une nouvelle levée en seed pour élargir notre gamme et notre distribution, notamment pour entrer sur le marché nord-américain.