Saisie en 2018 par le gouvernement pour réaliser un audit des substances chimiques présentes dans les produits de consommation (notamment les crèmes solaires, les lessives ou les cosmétiques) qui ont un impact sur les coraux, l’ANSES appelle à limiter les rejets de substances dangereuses à la source.
L’impact de plusieurs substances chimiques confirmé
Sur la centaine de substances identifiées comme potentiellement toxiques pour les coraux, l’Agence a pu mener une évaluation des risques pour une cinquantaine d’entre elles (filtres UV, hydrocarbures, pesticides et métaux), en s’appuyant principalement sur les données disponibles en Guadeloupe, Martinique, à la Réunion et à Mayotte.
« L’expertise montre que la moitié des substances évaluées peut présenter des risques pour les récifs coralliens et contribuer à leur dégradation », conclut l’Agence, tout en alertant sur le fait que, faute de données disponibles, ce nombre est très probablement sous-estimé.
Pour réaliser ce travail, l’ANSES s’est appuyée sur une étude de l’Office français de la biodiversité et de PatriNat qui recense des substances chimiques susceptibles d’avoir des effets toxiques sur les coraux.
« Nous avons ensuite croisé les seuils de danger applicables aux coraux pour ces substances aux niveaux de concentration observés dans l’environnement. Cela nous a permis d’identifier les substances à risque pour les coraux situés en Guadeloupe, Martinique, à Mayotte et à la Réunion » explique Karen Burga, coordinatrice de ces travaux.
Justifier les allégations sur les crèmes solaires
Pour la famille des filtres UV, l’expertise a notamment identifié trois substances comme toxiques pour les coraux : l’oxybenzone, l’octinoxate et l’octocrylène.
Cet été, l’ANSES s’était d’ailleurs déclarée favorable à l’interdiction de l’octocrylène dans les produits de protection solaire en raison de ses effets sur l’environnement.
Dans son récent rapport, l’ANSES souligne que les allégations (mentions ou pictogrammes) mises en avant par certaines marques concernant le respect du milieu marin doivent être étayées par des études scientifiques. Toutefois, l’Agence estime que la présence d’oxybenzone, d’octinoxate ou d’octocrylène « semble incompatible avec la possibilité de bénéficier de telles allégations ».
Pour introduire un peu de clarté dans les revendications liées à la protection des milieux marins, l’Université Ben Gurion du Néguev à Eilat avait plaidé en juin en faveur d’une nouvelle norme internationale baptisée RPF (pour Reef Protection Factor).
Réduire les rejets des substances chimiques dans le milieu marin
Face à cette situation, l’Agence recommande de créer ou de renforcer la surveillance et le suivi des substances chimiques ayant un impact sur les récifs coralliens.
L’ANSES appelle également à limiter les rejets de substances dangereuses à la source par des restrictions d’utilisation ou par l’interdiction de mise sur le marché dans le cadre des réglementations telles que REACH. Enfin, elle recommande d’améliorer le fonctionnement des réseaux d’assainissement des eaux usées.